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Fanny Ringrave – La Vie de Woo Outrigger après Guy Ringrave

Le 24 avril dernier, Guy Ringrave, le fondateur de la marque française de pirogue, Woo Outrigger, disparaissait en mer et laissait la famille de la rame endeuillée et nombreux piroguiers orphelins d’un ami et mentor. Sa fille, Fanny Ringrave, en plus du cataclysme émotionel, a dû immédiatement s’attaquer à une tempête entrepreneuriale à laquelle elle n’était absolument pas préparée. 9 mois après ce passage de relais violent forcé par le destin, elle est , à 27 ans, à la tête d’une entreprise saine et pleine de projets, plus déterminée que jamais à faire vivre la grande aventure de la marque Woo, les passions et les valeurs instilées par “Guytou”. Pour cela elle peut compter sur une équipe et des partenaires solides et cette incroyable Woo Family de clients riders et amis qui a su montrer qu’elle était là dans les meilleures et pires moments.


Bonjour Fanny, tu as été propulsée par le destin à la tête de l’entreprise Woo, peux-tu nous en dire plus sur toi et ton parcours ?

Bonjour Mathieu. Après un bac S et une licence d’ingénieur, j’ai fait un master en management de la mode (rien à voir, j’avais juste envie de changement!). Mes études d’ingénieur m’ont aidé à acquérir la rigueur et l’organisation nécessaire pour survivre au monde professionnel et mon master dans la mode m’a conduit à faire mon stage de fin d’étude chez Quiksilver. J’étais déjà très attachée au sport de glisse et à l’Océan… avec un papa comme le nôtre, ma sœur et moi on n’a pas eu trop le choix ! 

Pour mon stage chez Quiksilver, j’ai déménagé dans la région. J’y pensais depuis longtemps, mon père y était déjà installé – tout comme mes grands-parents – je ne suis plus jamais repartie. A la fin de mon stage, les embauches chez Quiksilver sont gelées, je dois trouver un autre job… je bosse 2 ans au comptoir du foie gras, en attendant que WOO ait les moyen de soutenir un poste supplémentaire…

Il y a 4 ans, j’atterris au Marketing et à la communication… avec Guytou, on forme une team : il s’occupe du développement commercial tandis que je développe la nouvelle image de l’entreprise et travaille à constituer notre communauté sous le hashtag #WooFamily.

A ce moment-là, je gère aussi le quotidien de l’atelier (les appros, les plannings, la vie de la boîte…) : dans une petite structure, il faut savoir s’adapter et toucher à tout !

Comment l’entreprise Woo a-t-elle réagi suite à la disparition de Guy et comment s’est passée la transition pour toi à la tête de la société ?

WOO et le monde de la glisse ont perdu brutalement un visionnaire, un homme passionné et généreux. Évidemment pour l’entreprise ça n’a pas été facile.

Nous sommes passés par une longue phase de grandes turbulences dans laquelle il a fallu vite prendre les choses en main. Il a fallu apprendre à qui nous pouvions faire confiance, appréhender les problématiques de gestion (et en France, ce n’est pas une mince affaire), faire le point sur les chiffres, gérer l’inquiétude de nos partenaires et fournisseurs…

Nous avons beaucoup travaillé pour avancer et sauver le projet. On ne va pas se mentir, on est passés par des moments compliqués et tout est allé très vite. Les décisions étaient parfois difficiles à prendre car on n’était jamais sûrs de rien…

Heureusement, l’équipe n’a rien lâché et j’ai vraiment pu compter sur eux. J’ai aussi été très entourée, notamment par ma sœur qui m’a accompagné sur chacune des décisions importantes… pas un jour ne passe sans que l’on s’appelle ! On discute beaucoup et n’avons jamais envisagé d’abandonner. Le soutien, l’hommage et le souvenir… Je pense que c’est ce qui nous a guidé et nous a aidé dans cette difficile transition…

En fin d’année 2019, de nouveaux partenaires nous ont rejoint pour soutenir notre développement… nous en avions bien besoin ! Maintenant, on a des projets plein la tête et on compte bien les réaliser !

Frédéric Basse a eu un rôle important dans cette transition, peux-tu nous dire qui il est ?

Frédéric Basse est l’ex dirigeant de Rip Curl Europe. C’est un grand surfeur, un rider de renom et le président d’Eurosima. C’était surtout un grand ami de mon père, en qui il avait une confiance absolue.

Frédéric est une des rares personnes à lui avoir tendu la main dans les moments les plus difficiles. Il s’est associé à mon père il y a quelques années, et a investi dans la boîte qu’il connaît par cœur. Il croit et soutient le projet depuis toujours.

Quand Guytou a disparu, il nous a accompagnées pour nous aider à comprendre ce qui devait l’être. Nous avons clarifié ensemble la situation et avons structuré notre réflexion.

Il a vraiment été d’une aide précieuse pour naviguer dans cette tempête… avec un seul objectif : sauver le projet et continuer de développer la Woo Family et notre équipe.

Guytou lui devait beaucoup.

WOO lui doit énormément.

J’en profite pour le remercier, du fond du cœur, pour tout ce qu’il a fait pour nous.

Quel rôle a joué la Woo Family dans ce moment difficile ?

La WooFamily est notre plus belle réussite. C’est une communauté fidèle et passionnée, toujours prête à aider. . Ce sont des clients bien sûr, mais pour la quasi-totalité d’entre eux, ce sont des amis, des soutiens du quotidien.

La WooFamily c’est un état d’esprit, de cohésion, de solidarité, de fun et de résilience.

Tous autant qu’ils sont, ils nous donnent la force et l’envie d’aller toujours plus loin, d’innover, de créer, de se développer…

Comme nous, la communauté a été profondément choquée par la disparition de Guytou mais s’est relevée plus forte que jamais.

C’est dans sa passion et dans cette communauté que Guytou puisait sa force au quotidien et on a fait pareil !

Crois- moi, quand tu as la chance d’avoir une communauté aussi investie que la nôtre… tout est possible.

Que peux-tu nous dire de l’évolution du marché de la pirogue et comment Woo s’y inscrit ?

En France, la fédération de Kayak (dont dépend la pirogue) commence à prendre sérieusement en compte ce support dans ces réflexions et ces projets ; notamment par la mise en place de formations d’encadrement « sport de pagaie » qui intègrent la pratique. Cela participe considérablement à la structuration du marché et c’est une vraie bonne nouvelle !

On ressent que les choses bougent vraiment ces 2 dernières années, on observe un vrai engouement pour la pirogue !

Nous avons vraiment pris conscience, au travers de tous vos hommages, du rôle que Guytou a joué dans le développement de ce sport et par ricochet, du rôle que nous devons continuer de jouer. Sa volonté première était de permettre à chacun de pouvoir ressentir ces sensations de glisse extraordinaires, c’est tout l’objectif que nous poursuivons également. D’autant que la pirogue est complémentaire avec d’autres sports déjà bien installés comme le dragon boat ou le SUP.

Cela nous offre de réelles opportunités et nous ouvre les portes d’un marché bien plus conséquent. D’ailleurs, on observe que de nouveaux acteurs sur le marché (donc des concurrents !) apparaissent et nous voyons ça plutôt d’un bon œil (rires).

C’est signe d’un avenir prometteur : ça veut dire que la pratique se développe. Cela veut aussi dire que le succès passera forcément par l’amélioration continue de nos produits et de nos services. On doit prendre du recul et faire preuve d’humilité pour nous remettre sans arrêt en question, nous réinventer sans cesse et conserver une place incontournable sur le marché. C’est stimulant !

Après le lancement de la Feline il y a 2 ans, adoptée notamment par Olivia Piana et Sonni Honscheid parmi des dizaines d’autres SUP racers, est-ce que le lien entre le monde de la pirogue et du Stand Up Paddle perdure?

Je pense que la complémentarité entre ces deux sports n’est plus à prouver ! Beaucoup de SUP Racers ont, aujourd’hui, intégré la pirogue dans leurs entrainement ou simplement par passion. L’an passé c’est Paul Conrad, Waterman sur l’île de beauté qui a rejoint le Team. Sa Pueo est venue compléter un quiver qui lui permet, désormais, de naviguer un maximum de jour dans l’année !

Aussi un support comme la pirogue pour continuer à progresser et s’enrichir de différentes expérience de rame.

En Guadeloupe, on a pu initier une dizaine de SUP racers au DownWind en OC et leur sourire en dit long !

Il semble que la base Woo en Guadeloupe a pris beaucoup d’ampleur en 2019 et 2020. Peux-tu nous dire ce qui a changé en Gwada ?

Nous tenons beaucoup au Woo Xp Center en Guadeloupe. C’est, depuis toujours, un cap stratégique de la « grande Aventure », dessinée par Guytou.

Nous avons pensé Le Downwind camp de façons à ce qu’il soit plus qu’une simple « paddle school » c’est un événement au cours duquel des paddlers du monde entier (Canada, Argentine, USA, Angleterre, Espagne, France…)  ont l’opportunité de se réunir autour d’une même passion. Ce sont des moments de partage avec la WooFamily qui sont très important pour nous. A cela, s’ajoute des conditions de downwind quasi idéales une bonne partie de l’année… alors pourquoi nous limiter à 6 semaines ?

De là, est née l’idée d’une base permanente. Notre partenaire de confiance était tout trouvé : passionné, excellent rameur et professionnel de l’encadrement, Benoit Arribat est investi à nos côtés depuis le début.

Si le projet a forcément était retardé par les évènements récents, on continue d’y travailler activement. Portés par le succès du Downwind camp 2020 qui se termine actuellement ☺

Où sont présentes les pirogues WOO dans le monde ?

Actuellement, nous exportons 40% de notre production à l’étranger (Canada, Afrique du Sud, Angleterre, Espagne, Portugal, Japon, Norvège, Hong-Kong…).

Regardez bien et vous apercevrez nos pirogues sur la quasi-totalité des mers et des océans de la planète… Et ça rend fier 🙂

Plus sérieusement, l’export représente un axe majeur de notre développement : nos objectifs à court et moyen terme sont ambitieux. Pour les atteindre, il va falloir relever plusieurs challenge en commençant par engager des actions structurantes au sein de notre réseau de distribution… Ensuite, il faudra trouver les bons partenaires ! 🙂

Quels sont les projets de Woo que tu peux dévoiler pour un avenir proche ?

On est motivés, on veut innover, optimiser nos process de fabrication (pourquoi pas en nous installant dans un atelier plus grand, plus adapté) et continuer d’agir au service de l’emploi en France.

Notre plus gros chantier pour 2020 : une nouvelle OC1 pro. On a commencé les plans en prenant en compte, via un principe itératif, les retours et les souhaits d’amélioration de nos riders et amis.

Ce sera la première pirogue que nous aurons conçus de A à Z, tous seuls, c’est-à-dire sans Guytou. Alors on ne veut pas se rater. Ca met une certaine pression mais c’est positif.

On veut être disruptifs, innover, rêver… On veut sortir un bateau qui fait la différence. D’autant qu’elle lui rendra hommage. On a déjà son p’tit nom, mais pour l’instant il reste secret…Vous en saurez un peu plus d’ici cet ‘été 🙂

Ensuite, nous espérons pouvoir faire évoluer notre offre en proposant des produits et des services toujours plus adaptés à la pratique, à son esprit, et à une #WooFamily  encore plus connectée. On souhaite également agir au service de la prévention des risques. La sécurité est pour nous devenue une priorité absolue… Comme marqué au fer rouge dans notre ADN. Alors on travaille actuellement à un kit sécurité adapté à la pratique et conforme à la réglementation.

Enfin, le succès du Downwind camp 2020, nous pousse à envisager l’ouverture de deux nouvelles destinations à court/moyen terme.  A part ça, je dirai que le projet c’est de continuer à défendre le made in france, une fabrication de qualité et un service après-vente réactif et efficace…

C’est déjà un sacré programme !

Pour plus d’information sur les pirogues Woo, rendez-vous sur :
> www.woo-outrigger.com
> www.facebook.com/WooOutrigger/

A propos de l’auteur

Mathieu Astier

Mathieu est le fondateur hyperactif de TotalSUP mais aussi un vétéran du marketing et de la communication web avec plus de 20 ans d'expérience aux côtés des plus grandes start-ups internationales. Son coup de foudre pour le Stand Up Paddle en 2013 l'a amené à construire l'une des principales plateformes d'information en ligne dédiées au SUP, en anglais et en français pour une audience mondiale, et à tourner sa vie de famille résolument vers l'océan.

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