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Championnats de France SUP Race ULD, quelles modifications possibles pour 2022?

Trois SUP racers et un organisateur, quatre expériences et quatre points de vue bien différents sur la Dordogne Intégrale en mode Championnats de France de SUP Race Ultra Longue Distance. C’était une première à Argentat le 11 septembre dernier, la course la plus longue de France, initialement une course multi-embarcations de canoë-kayak ouverte depuis 7 ans au Stand Up Paddle, obtenait pour la première fois dans l’histoire du SUP Race français, le label de Championnat de France, permettant de reconnaître et récompenser une discipline dont la croissance est fulgurante ces quatre dernières années. Emmanuelle Marcon, Championne de France 14 pieds, Alexis Hillairet Champion de France Unlimited, Christophe Mora, médaille de bronze aussi dans la catégorie Unlimited et membre de la commission de SUP race à la Fédération Française de Surf, et enfin Philippe Marchegay, l’organisateur de l’événement, nous donnent leur vision de l’intérieur sur ce galop d’essai qu’était la DI version Championnat de France et préparent déjà l’édition 2022!

Bonjour Emmanuelle, Alexis et Christophe. Quel bilan sportif est-ce que vous faites de ce 1er championnat de France d’Ultra Longue Distance ?

Emmanuelle Marcon : C’était la première Dordogne Intégrale que je terminais après la casse de la pirogue OC2 en 2020 au bout de 30 km. Pour moi c’était donc presque une première mais tout était au top : beaucoup d’eau et de courant, la météo parfaite, en ce qui me concerne pas de problème de casse ni d’algues, une émulation entre les 3 premières femmes pendant une bonne partie de la course car rien n’était joué. Perso, cela m’a amusée de jouer l’outsider / “dark horse”, car personne ne m’attendait. Je ne savais absolument pas à quoi m’attendre moi même. Certes j’espérais atteindre le podium mais pas la première place, donc c’est génial quand tu vois que tu es dans le trio de tête pendant le début de la course, puis deuxième, puis première sur les 50 derniers km environ. Mais toujours avec la possibilité de te faire remonter, donc pas de relâchement possible. C’est ultra motivant. J’ai pris beaucoup de plaisir tout le long même quand c’était dur, c’est beaucoup plus fort qu’une course classique de 15 km.

Christophe Mora : Personnellement c’est un super bilan. On a eu la chance d’avoir beaucoup de courant, du coup ça va plus vite et j’ai explosé mon record, j’ai mis 10h 59 minutes, l’année dernière j’avais mis 13.30 pour référence. Et j’ai fini 9ème au scratch, ce qui est aussi pour moi ma meilleure perf et j’ai réussi à accrocher la médaille de bronze en Unlimited, sur 5 participations ça fait 3 que je fais sur une Unlimited et donc je suis très content de cette médaille de bronze.

Alexis Hillairet : Cette année encore et pour ma 3e participation à la DI, j’ai le sentiment de faire 2 courses en une, ou plutôt de distinguer 2 phases de course bien différentes. La première, celle que je préfère, car il y a le moment du départ où tu cherches à faire ta place, puis à jouer avec la rivière grâce aux passages de rapides, la navigation est ludique, les autres rameurs sont encore au contact, le jour qui se lève au fur à mesure que tu avances et laisse apparaître le paysage. Et la seconde partie où la rivière devient plus calme, voire presque monotone, surtout quand tu te retrouves seul sans concurrent pour te stimuler un peu, le corps fatigue, la nutrition et l’hydratation sont à ce moment là très importantes, …je pense que c’est ça qui m’a valu un coup de mou autour des 80kms et qui ne m’a pas lâché jusqu’à l’arrivée. A retenir, une belle édition 2021, avec des top conditions, un bon débit d’eau et grand soleil, (peut-être un peu trop l’après-midi 🥵), de super moment sur l’eau, surtout au passage de Beaulieu que je parviens à franchir debout (semblerait que je sois le seul 💪). Et un temps finish de 10h02, d’où le prochain objectif : finir en moins de 10h.

Vous connaissez tous les trois la Dordogne Intégrale, ça a changé quoi pour vous qu’elle donne lieu cette année à des Championnats de France ULD ?

Alexis Hillairet : je trouve judicieux le choix que la Fédération Française de Surf a fait de mettre en valeur l’ULD avec ce championnat de France. Mais je me demande si ça ne fait pas un peu doublon avec le Championnat de France longue distance. Déjà qu’il y a un doublon Championnat maritime et un Championnat eaux intérieures. Mais si une autre édition a lieu, c’est avec plaisir que j’y participerai.

Emmanuelle Marcon : perso, j’ai apprécié de gagner la DI mais aussi d’avoir mon premier titre national FFS toutes catégories d’âges confondues. C’était bien que la FFSurf soit présente sur place, ils ont assuré sur la com’ juste à la suite de l’événement (interview, articles…), c’est cool. Je pense que ça contribue à donner plus de reconnaissance à cette discipline en général ainsi qu’aux riders eux-même. J’espère que ça va motiver plus de monde à participer en 2022.

J’aime bien le fait qu’il y ait aussi les kayaks, les pirogues, les relais… je pense que ça crée plus d’ambiance et d’animation qu’un Championnat de France ULD SUP pur, où il y aurait 4 ou 5 fois moins de monde sur l’eau.

Enfin, c’est bien qu’une course comme ça se fasse d’un point A à un point B. Même si c’est compliqué question logistique, je ne me vois pas faire un Championnat de France ULD en faisant 10 tours du même lac ou quelque chose dans ce genre.

Certes, pour ressentir l’ambiance, avoir du public, voir où en sont les autres riders, c’est peut-être mieux, mais je pense que ça doit être quand même beaucoup plus dur pour la motivation sur la durée, plus lassant, moins grisant, et le côté émerveillement devant les paysages doit manquer.

Christophe Mora : C’est vraiment une super idée que la Fédération Française de Surf ait choisi la Dordogne Intégrale car c’est quand meme la DI qui a lancé les courses ULD en France. C’est, je crois, la 7ème édition de la DI ouverte au SUP alors qu’historiquement, depuis 3/4 ans, on a aussi maintenant la TAWARA, les 10h de Vassivière, le Marathon des Gorges de l’Ardèche et bien d’autres. On risque d’avoir des nouvelles courses qui émergent en ULD. Il y a eu aussi la loire 725, en version essai qui va être officialisée l’an prochain. Il y a donc vraiment de l’avenir sur ce type de courses.

Autre point intéressant pour moi, c’est de rappeler que l’ULD ce sont des lacs et des rivières, or, jusqu’à aujourd’hui le SUP a surtout touché des publics qui se situent au bord de l’océan. Alors qu’en France on a de magnifiques cours d’eau, de magnifiques eaux intérieures énormément de monde qui peut se mettre au Stand Up Paddle par le biais des eaux intérieures, ça permet de valoriser toutes ces pratiques sur lacs et rivières et de motiver des gens à prendre leur license à la fédé et de développer notre sport

D’après vous, est-il judicieux de séparer les planches 14 pieds et Unlimited en deux catégories et classement distincts ?

Christophe Mora : Oui moi je suis assez favorable à ça. Je crois que les UL sont taillées particulièrement pour ce format de course ULD même si c’est Florent Dode qui gagne cette année au scratch en 14 pieds. L’année dernière c’était Olivier Darrieumerlou qui avait gagné en changeant de planche au milieu du parcours, à l’époque c’était possible, il avait commencé en UL et terminé sur une 14 pieds – mais vraiment quand on veut faire de l’ULD je trouve que c’est le format adapté. Alors bien sûr tout le monde n’a pas les moyens de s’acheter deux planches, une pour les courses ULD et l’autre pour les formats classiques, mais ça me parait une bonne idée de conserver les deux catégories bien distinctes et ça va permettre aussi à beaucoup de riders d’investir dans des UL, sachant que maintenant il y a les Championnats de France et que certains vont vouloir être plus performants dans cette catégorie.

Emmanuelle Marcon : Je ne suis pas sûre que la distinction 14 / plus de 14 soit utile pour les femmes, il y a déjà tellement peu de femmes, perso je trouve très dur de faire avancer une 18, mais je ne suis sans doute pas la mieux placée pour parler du sujet. En tous cas aucune femme n’était en plus de 14.

Philippe Marchegay : la question s’est posée bien sûr cette année car le vainqueur (Flo Dode) était en 14’ ! Mais il faut d’abord se rappeler qui c’est ! (5 fois vainqueur de la DI, recordman du monde des 24 h SUP…). On pourrait alors penser que ces 2 catégories ne sont pas indispensables et que c’est aux coureurs de faire leur choix de planche…

D’un autre côté, tout le monde n’a pas une unlimited ou n’a pas les moyens de s’en offrir une ; et ça ouvre des places à plus de monde. Donc au final, je trouve que le format 2021 n’était pas si mal !

Alexis Hillairet : à mon avis pour que le titre de champion de France ait une vraie valeur sportive, il n’en faut qu’un, donc je pense que le titre devrait être attribué seulement à une catégorie et plutôt en 14’. Deux titres de Champion de France sur une même course, ça n’a pas vraiment de sens à mes yeux.

Est-ce qu’il serait intéressant d’ajouter d’autres catégories de classement ? Par exemple, classes d’âge et tandems ?

Christophe Mora : Je veux rappeler que c’est un tandem qui gagne la DI au scratch, composé de Stéphane Leblond et Franck Siegel, devant Florent Dode. Le tandem est une discipline qui se développe qui était en démo l’an dernier sur les championnats de France en eaux intérieures, qui devrait, on l’espère devenir une discipline officielle sur le circuit classique et qui mériterait grandement d’être une discipline officielle sur le championnat de France ULD.

Pour ce qui est des autres catégories, je n’ai pas un avis tranché. On avait 40 inscrits en Championnat de France, si on avait des podiums par catégorie d’âge, … maintenant si on veut faire s’aligner sur les autres catégories des autres championnats de France, alors oui, et ça peut aussi motiver certains à venir s’aligner sur ce type de course, puisqu’ils veulent venir viser un podium dans leur catégorie d’âge.

Philippe Marchegay : Cette question est en lien avec la précédente de mon point de vue. Si on n’a plus de catégorie de planche ; alors il faut peut-être des catégories d’âge… Mais j’ai peur que nous ayons très peu de monde dans certaines catégories, notamment en féminines, avec le risque de ne pas pouvoir faire des podiums et ne pas décerner certains titres si il n’y a pas ne nombre d’engagé(e)s minimum dans la catégorie d’âge. Donc, là aussi je serai partisan du maintien.

Il est évident que la FF Surf doit pouvoir décerner des titres en tandem dès que possible (et c’est un sujet qui dépasse très largement l’ultra longue distance). Mais il faut aussi que les pratiquants soient conscients que c’est à eux de déclencher ce mouvement ! A quoi bon décerner un titre s’il y a, comme cette année, que 2 tandems inscrits ? Mais il y avait 10 tandems préinscrits si la course s’était déroulée en Mai.. alors je suis très optimiste sur cette discipline à moyen terme et je suis sûr que la Fédé saura réagir dès que les tandems auront fait la preuve de leur capacité à bouger en (petite) masse !

Par ailleurs, en tant qu’encadrant de jeunes et adultes handicapés, je pense que le tandem devrait être un formidable outil de développement du « parasup » (déficients visuels ou mentaux notamment), et j’espère que la Fédé saura saisir cette opportunité.

Alexis Hillairet : là encore je rejoins ma réponse précédente, et je ne pense pas que démultiplier les catégories soit une bonne idée. Je pense que seul le classement scratch mérite un titre. Après, rien n’empêche de remarquer les différentes catégories, mais il faut hiérarchiser les « récompenses ». Celui qui gagne au scratch a plus de mérite que celui qui va finir premier dans une catégorie de 5 personnes.

Emmanuelle Marcon : Je me fais le porte parole des copains en tandem, ils doivent être pris en compte et classés, ils ne sont pas présents sur le scratch FFSurf, comme s’ils n’avaient jamais fait cette course ! Tout comme les K2 ou OC2 sont classés dans toutes les courses de kayak ou pirogue.

Des idées pour améliorer et modifier l’événement que la FF Surf a déjà réattribué au même organisateur (DI) en 2022 ?

Emmanuelle Marcon :  une couverture par TotalSUP sur divers points de la course et à l’arrivée comme sur la TaWaRa, c’était top, motivant et génial pour l’ambiance sur place. Et je pense aussi que c’est important aussi pour la visibilité auprès du public français et étranger qui suit la course depuis chez lui, pour promouvoir cette course et plus largement la discipline SUP ULD.

Impérativement, une arrivée commentée au micro. J’ai passé la ligne d’arrivée sans être vraiment sûre que j’était première (on ne sait jamais, peut-être qu’une paddleuse étrangère que je ne connaissais pas était devant, comme sur la TaWaRa). J’ai dû demander aux copains présents à l’arrivée de me confirmer mon classement. Je suis restée ensuite au moins une heure à applaudir un maximum de SUP racers connus et inconnus qui arrivaient après moi, car je trouve très frustrant de terminer un tel effort sans que personne ne t’encourage à l’arrivée.

Puisque les podiums FFSurf se font avec les 4 premiers, alors il faudrait attendre que les 4 premières soient arrivées. Pour les femmes nous avons fait le podium à 3 alors que la 4ème n’était pas arrivée. Je me sentais gênée par rapport à cela, je me mettais à sa place, ça doit être frustrant. Certes les femmes arrivent globalement plus tard que les hommes, mais mettons-les autant en valeur !

C’est un peu dommage que certains n’aient pas pu passer les barrières horaires, bien sûr c’est justifié pour la sécu, mais peut-être qu’une course un peu moins longue (80 ou 100 km par exemple) permettrait à plus de monde et notamment de femmes de finir la course et d’amener ainsi plus de monde vers l’ULD. Pour préciser : seulement 6 femmes ont terminé la course et 4 n’ont pas passé les barrières horaires soit 40%. C’est quand même beaucoup. 52 sup hommes ont terminé la course pour 8 qui ne l’ont pas terminée soit 13%. (bon j’ai pas fait ces stats sur d’autres DI ou sur la TaWaRa donc je ne sais pas si c’est représentatif…)

Christophe Mora : Super bilan de ces premiers championnats de France sur la DI 2021, c’est une reconnaissance de ce type de format de course, l’ultra longue distance, une discipline qui se développe depuis plusieurs années. Cette année il y avait une centaine de SUP alors que c’est une année de pandémie et que l’événement a été repoussé de mai à septembre mais on est déjà monté à plus de 200 participants SUP les années précédentes. C’est une super chose que la FFS puisse reconnaitre ce type de course.

L’ULD c’est un format de course un peu particulier,  la Tawara c’est 80 kilomètres, la Dordogne Intégrale c’est 130 kilomètres. On part a minima pour une journée de navigation sur une rivière. Quand on se lance sur ce type de course, au moins la 1ère fois, le 1er objectif c’est d’arriver au bout. Et généralement une fois qu’on est arrivé, malgré le fait qu’on en ait bavé à certains moments parce qu’e sur une course comme a il y.a toujours des hauts et des bas, on a envie d’y retourner parce qu’on est allé au bout de soi, parce qu’on a passé dans des environnements magnifiques, parce qu’il ya une ambiance sur les courses Ultra qui est vraiment top, les coureurs rencontrent de nouveaux coureurs, apprennent à les connaître, on partage beaucoup sur nos expériences.

Pour moi il y a pas photo, la DI 2022 j’y serai, et encore plus pour l’édition 2023 puisque ce sera l’édition de la DI 360 avec une arrivée chez nous au Club des Marins de la Lune, puisque la course partira d’Argentat et se terminera dans mon département en Gironde.

Philippe Marchegay : le bilan est globalement positif car je pense qu’il fallait « lancer la machine » pour que cet évènement devienne peu à peu un RDV incontournable dans la saison.

Malgré les lourdeurs administratives et le COVID, la course s’est déroulée sans problème avec 3 très beaux vainqueurs et c’était le principal en cette année si particulière…

Bien sûr, on aurait aimait avoir plus de concurrents inscrits sur les France (50 seulement sur les 100 SUP participants en tout), mais il faut laisser le temps aux gens de se familiariser avec une nouvelle course. La décision de nous confier ces championnats n’a été officielle qu’au printemps 2021, et il a peut-être manqué un peu de comm en interne côté fédéral pour avoir plus de monde et plus de « beau monde »… même si une course de 130 bornes reste à part et ne réunira jamais tout le gratin du SUP national !

Au final, on a géré ça un peu comme un « numéro zéro »… qui décernait quand même des titres officiel. C’est pour cela que la FF Surf nous a confié cette orga sur les 2 premières années, ce qui nous permettra de faire des petits ajustements pour le 17 Avril 2022 en communication, en animations autour de la course et en accueil… mais le socle de la DI (parcours, chrono, convivialité) est solide et reste le même !

A propos de l’auteur

Mathieu Astier

Mathieu est le fondateur hyperactif de TotalSUP mais aussi un vétéran du marketing et de la communication web avec plus de 20 ans d'expérience aux côtés des plus grandes start-ups internationales. Son coup de foudre pour le Stand Up Paddle en 2013 l'a amené à construire l'une des principales plateformes d'information en ligne dédiées au SUP, en anglais et en français pour une audience mondiale, et à tourner sa vie de famille résolument vers l'océan.

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